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Le temps des feuilles mortes.

  Ah, c'était le temps des feuilles mortes, quand on s'allongeait dans l'herbe en riant et puis, fixant les nuages, quand on se laissait caresser par le vent d'ouest un peu froid. Ca nous faisait les joues rouges et les doigts engourdis, mélangés, on chuchotait comme si quelque rongeur pouvait nous surprendre. C'était la bonne odeur du foin qu'on foulait aux pieds en marchant à travers champs, vers un horizon que, bien sûr, on ne voyait pas. C'est qu'il y avait du brouillard ces jours-là, accroché aux buissons les plus touffus.

  Et on tentait d'avancer droit, tous les deux fermant les yeux, elle appuyée sur mon épaule, ma main autour de sa taille fine, toujours pouffant de gaieté, de liberté, d'insouciance. On n'était pourtant plus si jeunes, c'était le temps des romances, des bars et des capotes, elle me parlait d'un grand brun et d'un cinéma, je tenais toujours sa main et cueillais une fleur pour ses cheveux, elle riait encore ; j'évoquais la fille du deuxième étage et son sourire blanc, elle se moquait de moi, je la menaçais, elle se levait, m'échappait d'un bond, courait devant elle jusqu'à sentir mon souffle dans son cou, mais se laissait tomber dans les couleurs sauvages, épanouie comme l'une d'elles, fraîche, éternelle...

  C'était le temps des soirées sur la terrasse qui se prolongeaient jusqu'au matin, parce qu'un peu trop d'alcool, alors on parlait de ces voyages qu'on ferait aux Indes, non, en Afrique, bien au Sud, pour voir de quelle couleur serait la mer là-bas. On faisait brûler des bougies sur la table et l'un en face de l'autre on se fixait dans la flamme, ses pupilles dansaient, fauves, elle disait que je ressemblais à un ange. Et je soufflais la petite lueur pour l'entendre protester, et pour qu'elle m'envoie ce coup de pied sous la table, doucement, avant de craquer une énième allumette.
  Quand la cire fondait à nouveau, on prenait chacun une cigarette dans le paquet du vieil homme qui nous hébergeait et on se penchait tous deux, elle retenant ses cheveux d'une main, jusqu'à ce que la fumée monte dans nos gorges, mais on toussait alors et on laissait le tabac petit à petit brûler dans une assiette blanche, je disais que ça éloignait les moustiques et elle riait encore parce qu'il n'y a pas de moustiques en cette saison, je demandais tu es sûre, évidemment, ce que tu peux être bête, et son rire clair à la Lune.

  C'était à la fin de l'automne, quand les couleurs fuyaient en dégradé vers la terre, quand le vent arrachait leurs dernières parures aux arbres du jardin. Au matin, notre petit vieux nous trouvait endormis dans une chaise longue, fatigués de regarder les étoiles, sous une couverture de laine qui picotait le cou, mais elle disait ta joue est bien pire avec ce début de barbe, promets de ne pas te raser demain, on promettait toujours le monde, je promettais de ne pas me raser, elle souriait, et disait encore de dormir, mais l'aube venait qui nous surprenait dodelinants, ses cheveux sur mes lèvres, et je disais fais de beaux rêves, n'aies pas peur, en la berçant sans cesse.

  Quand finalement on se réveillait parce qu'il faisait décidément trop froid, et qu'on mettait le café sur le feu, et quand la vapeur montait ainsi en traînant avec elle cette délicieuse odeur de grains moulus, alors on répétait qu'il faudrait revenir, oui, il faudrait revenir l'année prochaine.

Déposé par dyangel, le Vendredi 10 Décembre 2004, 19:55 pour la rubrique Prose.

Les réactions :

myel
myel
10-12-04 à 20:40

Wah magnifique!
Envie d'automne, de feuilles, de vent, de rires et d'amitié (d'amitié, que j'en ai besoin)
Ton texte est vraiment splendide, je sais, je me répète, mais j'en ai besoin, je suis incapable de m'exprimer...
bisous
myel

 
dyangel
dyangel
10-12-04 à 22:36

Re:

Merci, ça me fait plaisir que tu dises ça.

" Fais comme l'oiseau,
  Ca vit d'air pur et d'eau fraîche, un oiseau,
  Et jamais rien ne l'empêche, l'oiseau,
  D'aller plus haut... "

dyangel...


 
myel
myel
11-12-04 à 11:41

Re: Re:

Ils ont bien de la chance les oiseaux....

 

07-09-06 à 08:57

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20-09-06 à 11:47

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20-09-06 à 19:36

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indrae
indrae
10-12-04 à 20:40

magnifique..

et que dire d'autre. A part que j'envie cette complicité, ce bonheur, cette joie qui semblent animer tes doigts sur le clavier quand tu parles d'un amour passé ou encore présent ?

 
dyangel
dyangel
10-12-04 à 22:40

Re: magnifique..

  Les magies de l'écriture... cet amour, il est dans mes yeux, ni passé, ni présent, toujours à chercher dans d'autres reflets.

  Merci,

dyangel