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Incipit.
--> une grande fierté personnelle, ce texte, même si cela fait très prétentieux...

  Un autre commencement, c'est tout ce qu'il demandait. Quelque chose d'un peu original, d'un peu touchant - quelque chose de différent. Ca l'obsédait, ce nouveau début. Petite révolution de l'âme sans conséquences, apparemment, apparemment parce qu'après tout nous ne sommes que commencement. Hasards.

  Chaque seconde est un départ. Il en demandait un autre et se débattait avec lui-même pour créer du neuf. Ne vous moquez pas de lui : il essayait vraiment - ce n'est pas facile de se recommencer tout entier, tout d'un coup, tout seul.

  Alors il se fit violence et s'obligea à voir les choses différemment. Il avait lu quelque part qu'on était ce que l'on percevait, ou peut-être l'inverse : il voulait donc se changer de l'extérieur en quelque sorte, vous comprenez ? Il se fit un peu poète en lisant énormément ; et lorsqu'il trouvait une image qui le surprenait, il tentait de la reconnaître empiriquement par une longue observation du monde. Effectivement, il parvint ainsi à se surprendre lui-même - oh, cela n'arriva qu'une ou deux fois, bien faiblement, mais si ténues que furent ses impressions, il sentit qu'il touchait là quelque chose d'essentiel dans sa quête de renaissance   
  Pourtant ce n'était pas suffisant. Alors il se fit un peu rêveur et voulut transformer le monde lui-même pour s'affranchir de ses lectures et se forger un nouveau regard. C'est alors qu'il se heurta à ses premières difficultés, en apparence insurmontables. Il avait en effet tant lu et tant appris qu'il appliquait inconsciemment ses connaissances aux objets de son entourage ; si bien qu'il fit une étude presque encyclopédique du monde en classant chacun des nouveaux éléments dans des catégories préconçues par d'autres. Il ne fut pas longtemps dupe de ses erreurs et, mentalement, posa l'interdiction absolue de ce qu'il appelait "intériorisme sauvage".

  Ce faisant, il donnait pourtant libre cours à un mal encore inconnu, bien plus dommageable et contagieux que tous les intériorismes de la pensée : le vide. Ce que les écrivaillons nomment pompeusement "syndrome de la page blanche" ; disons plus simplement SPB. Le SPB fut à l'origine de nombreuses insomnies, de migraines ravageuses, d'interminables heures d'expectative, bref, le porta au bord de la crise de nerfs. Notre héros semblait bien mal en point et, pour tout dire, il fut sur le point de renoncer à ses exigences novatrices. Il allait décider de s'appeler Charles Télard, 31 ans, fonctionnaire de son état, aux cheveux grisonnants comme ceux d'un Hercule Poirot ; lorsqu'un sursaut de dignité le transperça de part en part : quoi ! lui, si fier, si lettré, si original dans tout ce qu'il entreprenait, lui allait se contenter d'un conformisme rassurant au coeur même de son identité ? Plutôt succomber du SPB !

  C'est de cette sorte d'électrisation que jaillit la réponse à toutes ses interrogations. Son originalité, il l'avait ! Cette quête étrange qui l'occupait depuis de nombreux mois le posait d'ores et déjà comme un explorateur inédit, comme un aventurier, comme un précurseur... Dès lors, disparu le SPB. Disparus les intériorismes sauvages ! Il explosait soudain de nouveauté, enfin il se sentait un autre, un être du devenir ; et déjà il ne songeait plus à regarder vers l'arrière. Afin de concrétiser cette Renaissance, il s'écrivit. Incipit.

  Son nom inscrit là, sur cette page, son nom d'encre noire en caractères penchés, le ravit un instant, un long instant, juste le temps d'un départ...

...et puis...

  

                                  ...il fallut trouver un autre commencement.



Déposé par dyangel, le Mardi 26 Avril 2005, 19:07 pour la rubrique Prose.